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Flora Buijten, Diplômée MBS et Artisan formée chez Hermès

21 octobre 2022 Association
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Flora est une diplômée MBS 2018 qui, après un parcours international et une expérience formatrice en tant qu’artisane chez Hermès, a décidé de vivre de sa passion, de redonner à son tour et lancer son propre atelier. D'études de management et commerce à l'artisanat et l'entrepreneuriat, découvrez son parcours ambitieux.

"Il ne s'agit pas d’un changement de parcours, simplement d'une continuité"

Qu’est-ce qui a motivé ce changement de parcours ? 

 

Depuis enfant j'ai une forte attirance et aptitude pour les métiers manuels; les réalisations qui nécessitent minutie et dextérité sont celles où je m'épanouie. Par le biais de l’équitation j’ai eu le goût des belles choses, de la noblesse des matériaux, et donc du cuir. Baigner dans le monde de ce sport m’a appris la rigueur, la beauté du geste, le sens du détail, la remise en question et que la perfection n’existe pas, mais que certaines disciplines ont pour essence de s’y rapprocher un maximum. 

Mon grand-père était artisan boucher, mon oncle est féru de mobilier design, ma mère m'a apporté le goût pour la transmission et mon père pour le business. On mixe toutes ces influences et on a mon projet actuel. C'est intéressant avec le recul de se rendre compte des différentes influences.

Donc pour répondre à votre question, je ne pense pas qu'il s'agisse d'un changement de parcours, simplement d'une continuité. Faire des études sur le management et la stratégie commerciale à l'international ne ferme pas de portes, au contraire cela permet d'en ouvrir d'autres, de mutualiser des compétences et appétences. Les études business, n'ont pas forcément pour vocation d'amener à un travail de bureau 100% commercial.

Suite à vos expériences de stages/alternances et votre diplôme à MBS, peut-on parler de reconversion professionnelle ? 

 

Je ne pense pas qu'il s'agisse purement d'une reconversion professionnelle, mais d'une continuité, ou d’une spécialisation. 

Lorsque je travaillais en tant qu'artisan chez Hermès, effectivement on peut parler de reconversion ; sur une durée de 3 ans. Être embauchée à un statut d'ouvrier, renoncer aux avantages en termes de salaire, se retrouver “en bas de l'organigramme", apprendre le métier d’artisan, et s'épanouir dans ce travail. Je ne regrette absolument pas, au contraire cela amène une vision très enrichissante d'avoir pu faire partie "des deux côtés".
Et je pense sincèrement que c’est par le biais de ce parcours atypique que je me démarque aujourd’hui. Le travail en collaboration tant avec des architectes qu’avec les fournisseurs ou artisans est beaucoup plus naturel et fluide.

 

Pouvez-vous nous parler d’un souvenir marquant lors de votre parcours à MBS ? 

 

Je pense que ce qui m’a le plus marqué, ce sont la mixité des expériences que l’école m’a apportée : les stages dans des grandes institutions comme l’IFCE (Institut Français Du Cheval et l’Equitation) ; mais aussi l’année passée au Mexique, avec une expérience de consulting pour BMW. 
MBS est très tourné vers l’international tant dans les nationalités présentent sur le campus que dans les opportunités d’expériences professionnelles et je pense que c’est ce qui m’a le plus plus apporté.

« Mon entreprise est la parfaite combinaison de mes compétences, valeurs, et influences »

Pouvez-vous nous en dire plus sur le concept de votre entreprise ? 

 

Artisan formée par la maison Hermès aux techniques de maroquinerie traditionnelles et de luxe,  mon activité est centrée sur la transmission et préservation des savoir-faire artisanaux anciens.
A la fois en réalisant de l’aménagement et décoration d’intérieur en cuir ; en collaboration avec des architectes et designers. Ce sont des créations à 4 mains, permettant de proposer aux clients des produits beaux, design, intemporels et de qualité. Mon entreprise est la parfaite combinaison de mes compétences, valeurs, et influences. 

En ce moment par exemple, je suis sur un projet de réalisations de rideaux semi-ajourés pour un restaurant gastronomique de Nantes ; et je co-crée une collection de mobilier en cuir avec une architecte de Marseille.

Ainsi que par le biais de formations aux professionnels de la maroquinerie pour leur permettre de monter en compétences sur certaines techniques. 

Pourquoi allier formation et prestation de service ?

 

La préservation des savoir-faire a toujours été un sujet qui m'a tenu à cœur, et si je n'avais pas été artisan je pense que j'aurai quand même développé une entreprise qui va dans ce sens. Depuis plusieurs décennies les métiers manuels ne sont pas valorisés ce qui engendre une perte conséquente de savoir-faire car les anciens n'ont plus l'opportunité de transmettre ces techniques qui font pourtant partie de notre patrimoine et culture française.

 

Je revendique donc les techniques traditionnelles, leurs qualités et leurs transmissions.

Chez Hermès j'ai appris la maroquinerie à l'ancienne, à la main, les coutures sont cousues point par point, à la main. Et peu de formation le propose aujourd'hui ; car les CAP maroquinerie au même titre que les CAP en cordonnerie par exemple, forme des artisans à un métier de production et de rendement.  

Or les techniques à la main sont certes plus lentes, mais aussi bien plus solides.

 

Mon activité est portée par des valeurs de décroissance, où le consommateur est acteur. Transmettre ces savoir-faire pour moi c’est participer au changement de modes de consommation : Tirer les coups vers le bas et donc la qualité, n'a plus aucun avenir aujourd'hui. 

 

Ayant eu la chance d'apprendre dans la plus belle des maisons de maroquinerie à mon sens, et de pratiquer ce métier chez eux pendant 3 ans, il était inconcevable pour moi de ne pas ajouter ma pierre à l'édifice en termes de transmission de ces savoir-faire anciens. C'est pourquoi mes formations sont dédiées aux professionnels de la maroquinerie, afin de permettre de monter en compétences sur ces techniques de maroquinerie traditionnelle et de luxe.

Mon expérience en stratégie commerciale acquise à MBS me permet de proposer également une approche business permettant de travailler aussi l'optimisation de la production, connaitre son client cible, définir son prix, etc... 

Quelles expériences vous inspirent pour créer votre vision de la décoration d’intérieur ? 

 

Le sens du toucher de la matière, son odeur, les aspérités, reconnaître du premier coup d'œil un bel objet et une belle matière, ce sont des notions qui m’ont toujours accompagnées.

Depuis enfant je suis attirée par l'esthétique au sens global, mais aussi particulièrement par la noblesse des matériaux et les technicités artisanales.


Et je me considère extrêmement chanceuse aujourd'hui de pouvoir travailler sur des projets d'aménagement d'intérieur et décoration en cuir ; autant avec des architectes que des designers. C'est très enrichissant, les jours ne se ressemblent pas, et il y a toujours de nouveaux défis et apprentissages autant en terme technique que business.


Ma vision de la décoration d’intérieur est inspirée du design des années 50/70 qui reste encore aujourd’hui une forte influence dans le monde du design.

Je souhaite sortir du cadre de la “mode” et proposer des réalisations aux formes organiques, épurées, qui mettent en valeur la beauté de la matière et des techniques. 
L’objectif : Réaliser des objets en gardant à l’esprit qu’ils doivent allier le beau à l’utile, qu’ils soient de qualité, avec des lignes intemporelles afin qu’ils soient transmis à leurs tours. 
Je fais un contrepieds à la surconsommation, où le consommateur garde des œillères et n’est pas acteur. Un acte d’achat peut être politique, et a un impact, et c’est important de se rappeler de cette notion que nous avons perdus.


Je pratique la maroquinerie traditionnelle à l'ancienne, cousue à la main, essentiellement en cuir de tannage végétal qui sont des cuirs très beaux, ayant la particularité de patiner dans le temps. 

« Durabilité, recyclage, démarche de consommation consciente, à l'échelle de mon activité j'essaie de communiquer un maximum sur le sujet afin que le public devienne averti »

Puisqu’il s’agit de cuir, comment prenez-vous en compte l’aspect environnemental et responsable de votre activité ?

 

 C'est effectivement une question qui revient souvent, et je comprends. J'ai moi-même mis longtemps à me sentir à l'aise avec ce sujet par convictions personnelles mais également avec les changements sociétaux.

Ce qui est important, c'est de connaître et dissocier ses combats. Je m'explique : Avec le cuir on peut aborder le sujet de l'écologie autant que l'éthique. Ce sont deux problématiques différentes, aux solutions différentes. S'il s'agit d'une préoccupation éthique, effectivement le cuir n'est pas la matière la plus adaptée. 

 

En revanche, lorsqu'il s'agit d'une préoccupation écologique, le cuir est au contraire une solution intéressante, mais peu plébiscitée. Le cuir, est la matière la plus résistante à l'usure dans le temps. Les alternatives au cuir animal sont des alternatives contenant du plastique, ce qui n'est pas écologique, et la plupart du temps ces matières ne résistent pas autant dans le temps. Le cuir permet la réparabilité.

 

Les alternatives dit "cuirs végétaux" vont s'user plus vite et donc inciter à racheter plus souvent. Tandis que le cuir animal quand il est de qualité, c'est la possibilité de réparer son article, le choyer, et garder de nombreuses années. La créatrice Amélie Pichard a fait un superbe podcast qui explique tout cela (ref "Dure à cuire", dispo sur toutes les plateformes)

A l'échelle de mon activité j'essaie de communiquer un maximum sur le sujet afin que le public devienne averti, et soit dans une démarche de consommation consciente. Et je propose toujours des cuirs en tannage végétal, car c'est le cuir le plus beau à mon sens, et c'est le cuir le plus écologique. C'est un cuir animal tanné avec des essences naturelles ; encore une fois il s'agit de techniques anciennes, qui permettent au cuir de vivre et se patiner dans le temps, et surtout d'être biodégradable.  

 

Quels conseils pourriez-vous donner aux étudiants souhaitant se lancer dans l’entrepreneuriat ?

 

C’est une expérience récente pour moi, je n’ai pas le recul suffisant pour en parler au sens global. En revanche je suis déjà convaincue par mon choix d’entrepreneuriat, c’est une expérience grisante, et pleine d'embûches et d’apprentissages. Pour laquelle il est essentiel de s'entourer, de prendre le temps d'avancer étape par étape. Mon top 3 des conseils serait :

1- Réaliser un plan d'action, et poser toutes les idées et tâches sur papier pour ne plus les avoir en tête.

2- Retenir que c'est ok si il y a un changement de plan, d'offre, de cible, c'est positif bien au contraire. Cela veut dire que le projet s'affine.

3- Ne pas faire passer la gestion comptable et administrative au second plan.

Découvrez l'atelier de Flora ici : https://www.atelier.buijten.fr/




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